Expulsé la veille de Noël, Ousmane Touré, un jeune Guinéen de 23 ans travaillant dans un restaurant de la Rochelle depuis trois ans, est revenu en France ce lundi. Il détient maintenant un visa de travail.
Amis, collègues, élus… Un vrai comité d’accueil attendait Ousmane Touré à la gare de la Rochelle lundi 22 janvier. Un mois jour pour jour après son expulsion, le jeune Guinéen a pu revenir légalement en France. « Il y avait des journalistes, des amis, des collègues, des membres de l’association des Guinéens de la Rochelle, des gens de la mairie, de l’équipe d’un député, de la préfecture… Ils étaient tous là pour m’accueillir. Je ne m’y attendais pas. Quand j’ai vu ça, ça m’a surpris, j’étais tellement content », raconte, soulagé, Ousmane Touré à InfoMigrants.
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Ce retour a pu avoir lieu grâce à une large mobilisation des collègues d’Ousmane Touré, d’associations, des autorités françaises et guinéennes et des personnalités politiques locales. « C’est grâce à tous qu’Ousmane est revenu », se réjouit Carlos Foito. « J’ai pu compter sur le préfet, le député Olivier Falorni et son équipe, la mairie de la Rochelle, l’important soutien de l’ambassadeur de Guinée en France, l’ambassadeur de France en Guinée ou encore le ministère des Affaires étrangères guinéen », raconte le patron du jeune homme.
« On va te faire revenir »
Dès qu’il a appris l’expulsion de son employé, le patron d’Ousmane a remué ciel et terre pour faire revenir son plongeur en France. « Juste après mon arrivée en Guinée, mon chef m’a appelé. Il m’a dit : ‘Je vais aller voir le maire et le préfet pour t’obtenir un visa. On va te faire revenir' ». De son côté, Ousmane Touré était déprimé, persuadé qu’il ne reviendrait jamais la France. « Quand mon patron me disait cela, ça ne me rassurait pas car dès que je suis monté dans l’avion, j’étais convaincu que je ne reverrais jamais la France ».
Mais après une lettre au préfet et un message sur Facebook, Carlos Foito a fait naitre une vague de soutien inattendue et tout est allé très vite. « Les soutiens venaient de partout. Beaucoup de monde m’envoyait des messages sur Instagram, on m’appelait sur mon numéro direct, etc… », raconte Ousmane Touré. Et face à la médiatisation de son cas, le dossier du jeune homme a avancé à vitesse grand V. Des rencontres avec la préfecture, les ambassadeurs guinéens et français et même des ministres ont eu lieu, permettant ainsi à Ousmane d’obtenir un visa et des papiers en un temps record.
Ainsi, le Guinéen, après avoir pris un jour de repos, a retrouvé son poste ce mercredi au Ginger, restaurant où il est en CDI depuis trois ans. Il dispose maintenant d’un visa d’un an qu’il compte bien renouveler. « J’ai compris avec cette histoire que la Rochelle, c’est ma famille. Je veux y passer le reste de ma vie », témoigne-t-il, soulagé d’être aujourd’hui en situation régulière. Maintenant, Ousmane Touré, comme son patron, sont ravis de se retrouver en cuisine et tous deux veulent faire de cette amère expérience un épisode du passé. « Il est temps que tout redevienne normal », insiste Carlos Foito, fatigué par l’ampleur qu’a pris la situation.
« Pourquoi Ousmane? »
L’expulsion d’Ousmane le 23 décembre dernier, seulement deux jours avant Noël, avait suscité de nombreuses interrogations, notamment au vue du parcours d’intégration du jeune homme. « Pourquoi Ousmane? », s’interrogeait d’ailleurs auprès d’InfoMigrants Didier Meyerfeld, membre de Solidarité migrants La Rochelle. C’est d’ailleurs ce parcours qui a poussé le préfet Brice Blondel a levé l’interdiction faite à Ousmane Touré de revenir sur le territoire français pendant deux ans. « C’est quelqu’un qui, avec sa promesse d’embauche, a vocation à reprendre son travail », a déclaré à France 3 Nouvelle Aquitaine le préfet de la région.
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Sous le coup d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF), Ousmane Touré s’était vu notifier son expulsion alors qu’il était venu pointer au commissariat comme à son habitude. Le lendemain, le 23 décembre, il était à bord d’un avion direction Conakry, ville qu’il n’avait plus vu depuis 2015 et son départ de la Guinée suite à la mort de ses parents.
Ce retour a donc été difficile pour lui : « J’ai attendu de rencontrer l’ambassadeur et le ministre guinéen et d’être sûr que j’allais retourner en France avant de trouver le courage d’aller retrouver ma famille car en Guinée, quand on te rapatrie, on dit que tu es un criminel car si la France, la patrie des droits de l’Homme, te renvoie, c’est que tu as fait quelque chose de répréhensible, que tu es un délinquant ».
Infosmigrants