Le gouvernement britannique a informé la Haute-cour de Londres qu’il prévoyait de commencer les premières expulsions vers le Rwanda entre le 1er et le 15 juillet. Plusieurs actions en justice, menées par des associations et un syndicat de fonctionnaires, pourraient néanmoins mettre à mal le projet.
Ce n’est plus qu’une question de semaines. Selon le juge Martin Chamberlain de la Haute-Cour de Londres, le gouvernement britannique a annoncé à cette juridiction qu’il prévoyait de démarrer les expulsions de migrants vers le Rwanda entre le 1er et le 15 juillet.
En avril, le Premier ministre Rishi Sunak avait indiqué qu’il s’attendait à ce que les premiers avions vers ce pays d’Afrique de l’Est décollent dans « 10 à 12 semaines », sans donner plus de précisions.
Les dates proposées par le gouvernement coïncident avec la période précédant les élections législatives et présidentielle du 15 juillet au Rwanda.
Premières arrestations
Après deux années de contestations, de recours en justice et d‘aller-retours parlementaires, Londres veut aller vite. Une semaine après l’adoption du Plan Rwanda dans la nuit du 22 au 23 avril, les premières arrestations ont eu lieu.
Dès lundi 29 avril, le gouvernement a affirmé avoir procédé aux premières interpellations de demandeurs d’asile susceptibles d’être renvoyés vers Kigali. Dans une vidéo mise en ligne mercredi 1er mai, le Home Office (équivalent britannique du ministère de l’Intérieur) montre ces premières arrestations et placements en détention. Selon le Times, des femmes se trouvaient parmi les personnes appréhendées par les quelque 800 agents déployés sur le territoire pour cette opération.
Contacté par InfoMigrants, le Home Office n’a pas souhaité « communiquer de détails opérationnels » concernant le nombre d’arrestations effectuées et les nationalités des migrants interpellés.
Mais, des associations britanniques ont donné un peu plus d’informations. Selon Care4Calais, plus de 100 personnes ont été arrêtées sur le sol anglais la semaine dernière : des Syriens, des Afghans, des Érythréens et des Iraniens notamment.
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Londres espère envoyer au Rwanda 5 700 migrants d’ici la fin de l’année. De son côté Kigali reste flou. « Nous serons en mesure d’accueillir les migrants que le Royaume-Uni enverra pendant toute la durée de ce partenariat. Ce que je ne peux pas vous dire, c’est combien de milliers nous recevrons la première ou la deuxième année. Cela dépendra de très nombreux facteurs qui sont actuellement étudiés », a déclaré Yolande Makolo, porte-parole du gouvernement rwandais, lors d’une interview à la BBC.
Le Rwanda abrite « un large éventail d’animaux sauvages »
Placés en détention, les demandeurs d’asile ont reçu un fascicule de 17 pages intitulé : « Je vais être transféré au Rwanda. Qu’est-ce que cela signifie pour moi ? », signale le quotidien The Guardian. Le document promet aux exilés qu’ils seront envoyés par avion vers « le pays aux mille collines » qui abrite « un large éventail d’animaux sauvages ».
Le livret entend rassurer les migrants sur ce pays, que les autorités britanniques considèrent comme sûr : « Le Rwanda est un pays généralement sûr et sécurisé avec un historique de soutien aux demandeurs d’asile ».
Le fascicule précise également que chaque personne expulsée dans le pays d’Afrique se verra accorder le statut de réfugié, la protection humanitaire, la résidence permanente ou sera « aidé à rentrer chez lui ».
Actions en justice
Mais les expulsions vers le Rwanda auront-elles lieu ? De nombreux observateurs s’interrogent sur la faisabilité du projet. Plusieurs actions en justice lancées par des associations ou des syndicats peuvent ralentir, voire mettre un terme au processus.
Le juge Martin Chamberlain, de la Haute-Cour de Londres, a organisé la semaine dernière une audience sur un recours contre le Plan Rwanda déposé par le syndicat FDA, qui représente les fonctionnaires.
La FDA souhaite que la justice examine la loi adoptée le 23 avril déclarant que ce pays d’Afrique de l’Est est « sûr ». Le syndicat veut savoir si la loi est conforme au code de la fonction publique. Selon ce code, les fonctionnaires, politiquement neutres, sont tenus de « défendre l’État de droit et l’administration de la justice ».
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La nouvelle loi permet au gouvernement d’ignorer certaines parties de la législation nationale et internationale en matière de droits humains, lorsqu’il décide de procéder à des expulsions, ainsi que toute injonction de la Cour européenne des droits de l’Homme, en vertu de l’article 39 de son règlement.
« Les fonctionnaires ne devraient jamais être dans une position où ils sont en conflit entre les instructions des ministres et le respect du code de la fonction publique », a dit le secrétaire général de la FDA, Dave Penman. « C’est pourtant exactement ce que le gouvernement a choisi de faire », a-t-il déclaré mercredi 1er mai.
« Il ressort du recours que certains fonctionnaires croient, ou ont été informés, qu’il serait contraire [à leur code, ndlr] de se conformer à la décision ministérielle de procéder à des expulsions vers le Rwanda », a déclaré le magistrat Chamberlain.
L’audience se tiendra au cours de la première semaine de juin. En attendant, le gouvernement de Rishi Sunak entend bien poursuivre ses arrestations et ses placements en détention.
infosmigrants